Les enclos paroissiaux sont caractéristiques de l’architecture religieuse rurale de la Basse-Bretagne et datent pour la plupart des XVIe et XVIIe siècle. Ils s’expliquent par la prospérité économique de la Bretagne, liée au commerce du lin et du chanvre à cette époque. Leur développement a aussi pour origine l’essor des foires liées aux grands événements de la vie liturgique, le contexte de la Contre-Réforme ainsi que l’importance du culte des saints locaux et des morts, témoins du syncrétisme breton.
Un enclos paroissial est au sens strict une église entourée d’un placître (espace non cultivé) voué ou non à un cimetière, que borne un mur d’enceinte. L’enclos doit rassembler au moins cinq des huit éléments suivants :
- L’église
- L’ossuaire
- La chapelle reliquaire
- Le calvaire
- Le mur d’enceinte
- La porte triomphale
- Le cimetière dans le placître
- La fontaine.
L’église Saint-Budoc
Vieille église romane (12ème siècle en partie) remplacée en 1894 par une monumentale église de style gothique flamboyant.
Les 5 panneaux de la chaire de l’ancienne église, datant de 1727, ont été conservés et entourent la chaire actuelle. Ils racontent la vie de Sainte Azénor et de son fils Saint Budoc :
- Sainte Azénor enfermée au château de Brest
- Sainte Azénor jetée à la mer dans un tonneau où naquit Saint Budoc
- Un ange veille sur le tonneau où est enfermée Sainte Azénor
- Sainte Azénor tenant dans ses bras son fils Budoc aborde aux côtes d’Irlande, à Beauport
- Saint Budoc coiffé de la mitre d’évêque
Revenu d’Irlande dans une auge en pierre Saint Budoc aborda à Porspoder. Mais fatigué du bruit de la mer il chargea son auge sur une charrette attelée de deux bœufs ; et là où elle se brisa, à Plourin, il fonda un oratoire sur l’emplacement duquel est bâtie l’église.
Version légèrement différente : la charrette se brisa à la sortie du bourg, là où se trouvait la fontaine Saint-Budoc, détruite par le remembrement, et en cours de restauration par l’association
Tenzoriou Ploerin.
La chapelle reliquaire et son ossuaire
L’ossuaire recevait les ossements exhumés car l’espace disponible pour les nouvelles inhumations manquait, que ce soit dans l’église même ou par la suite dans les cimetières souvent très petits.
La chapelle Sainte-Anne porte la date de 1669 au-dessus de la porte.
D’abord dédiée à Sainte Anne, elle fut rapidement dénommée chapelle de la Sainte Famille (mariage en 1675 « en la chapelle de la Sainte famille et sur le cimetière du dit Plourin, en présence de Missire François de Kergadiou, chevalier seigneur du lieu…….. »)
Depuis 1682 on y enterrait les enfants morts avant l’âge de raison
En 1700 le Recteur, Monsieur de Kersaint-Gily, fit don à la chapelle d’un tableau de la Sainte Famille.
En 1773 la marquise de Poulpry (de Kerenneur) lui fit cadeau d’une cloche appelée « cloche de Sainte-Barbe ». Cette cloche fut enlevée dans les années 1960 et a disparu.
Une partie de la chapelle servait d’ossuaire. On y exposait, dans des niches, les crânes des trépassés. L’usage cessa vers 1860.
La chapelle abritait une statue de Sainte Anne et de deux autres saints.
Le Calvaire
Calvaire vient du latin lui-même de l’araméen golgotha voulant dire crâne. Le Golgotha c’est le lieu de la passion du Christ.
Tout monument représentant au moins 3 personnages présents au Golgotha peut être appelé calvaire.
Les thèmes représentés sur les calvaires sont généralement :
- des épisodes de la vie du Christ, dont la Passion (et souvent les deux larrons sont représentés), et la Résurrection,
- la mort (thème fréquent en Bretagne)
- des thèmes liés à la Contre-Réforme : Rosaire, Sainte Famille, Anges gardiens…
- des saints vénérés localement
Jusqu’au XIXe siècle, les fidèles et voyageurs pouvaient y observer encore des traces de polychromie.
Le plus souvent le calvaire est dressé dans l’enclos paroissial comme gage de l’espérance en la vie éternelle pour les morts. Face à lui est édifié l’ossuaire où les reliques des défunts attendent la résurrection. La croix doit être « occidentée » parce que selon la tradition le Christ est mort à l’ouest, face au soleil couchant. Derrière la crucifixion il y a promesse d’aurore.
Le calvaire de Yan Larhantec (1829-1913)
Pour concevoir ce calvaire élevé en 1874, Larhantec s’est inspiré d’une pièce d’orfèvrerie elle-même fondée sur un ancien dessin et un vitrail de 1621 représentant l’entrée du Roi Henri IV à Troyes en 1595. Ce dessin se trouve dans le Dictionnaire de Viollet-Le-Duc publié entre 1854 et 1868
Une véritable dentelle de pierre. Mais le scellement du métal est à base de soufre et n’a pas résisté aux intempéries. 20 ans après il se dégrade, les arcs-boutants, les saints et les pinacles s’effondrent. Seule la pièce centrale de 8m reste debout. Au début du 20ème siècle la croix tombe.
En 1905 une première restauration a lieu, confiée à Donnart, car l’entreprise de Larhantec est près de la liquidation.
La croix est remplacée par une autre moins ouvragée. Le fût lui-même est remplacé par une colonne unie. En 1997 le conseil municipal décide la réhabilitation du calvaire qui est confiée à Pierre Floch et se terminera en 2002. Travail réalisé par un atelier de 6 personnes.
Une grande partie de la série des Apôtres a été rassemblée ; ainsi que vestiges ornementaux, arcs-boutants, pinacles, étrésillons. Et pour assurer la solidité de l’édifice de l’inox a été utilisé à l’intérieur de certaines pièces. Beaucoup d’heures de travail et 102 000euros.
Iconographie du calvaire
Tout en haut le Christ sur la croix
La Vierge Marie et Saint Jean
Les 4 Évangélistes :
4 évêques :
Tous deux faisant partie des 7 saints fondateurs de la Bretagne, venus d’Outre-Manche, du Pays de Galles et de Cornouaille aux 5ème et 6ème siècles.
Le mur d’enceinte et sa « Porte triomphale »
Le premier contact avec l’enclos paroissial est le portail monumental qui autrefois était fermé par une grille. Cette grille n’était ouverte que pour donner accès aux cortèges solennels, notamment ceux des enterrements. On appelait cette porte Porz ar Maro, la porte de la mort.
Pour accéder à l’intérieur de l’enclos, les fidèles devaient utiliser les portes latérales dont le passage était barré par une haute pierre sur champ, l’échalier, qu’il fallait enjamber.
Ce dispositif pouvait empêcher la divagation des animaux, mais surtout obligeait à une gesticulation contraignante, rappelant au fidèle qu’on ne pouvait s’approcher du divin sans difficultés, qu’il fallait mériter son salut…
Le cimetière dans son placître
Initialement, les enclos paroissiaux étaient en herbe, avec éventuellement quelques arbres dont la vente du bois assurait quelques revenus à la paroisse ; les jours de foire, la fabrique paroissiale autorisait la présence de boutiques, bénéficiant des redevances payées par les marchands ambulants.
Les morts étaient alors inhumés dans les églises, les places les plus proches des autels étant les plus recherchées. Le sol des églises n’offrant qu’un espace assez restreint, afin de pouvoir procéder à de nouvelles inhumations, l’on retirait les ossements des morts anciens que l’on déposait dans un ossuaire, appelé aussi « reliquaire » ou « charnier ».
En 1719, le Parlement de Bretagne interdit l’inhumation dans les églises et même si les recteurs auront bien du mal à faire respecter cette interdiction, progressivement l’habitude se prend d’inhumer les morts hors de l’église, dans l’enclos.
La chapelle Saint-Roch
A 3km à l’ouest du bourg, en bordure de la route Porspoder-Saint Renan, se dresse la chapelle Saint Roch, avec sa grande toiture et son clocheton à courte flèche.
La peste a atteint Plourin en 1639.
Saint Roch, lui-même guéri de la peste, est un des saints invoqués lors des épidémies.
De 1642 à 1647 la peste sévissait à Ploudalmézeau et parvenait jusqu’à Lanlell, village de Plourin, à 1,5km au nord-est du bourg. Les habitants firent alors vœu à Saint Roch de lui élever une chapelle s’ils étaient préservés du fléau. Leur prière fut exaucée et la chapelle édifiée en 1649. Mais loin du bourg, pour que les éventuels malades pussent s’y recueillir sans risque de contagion.
La chapelle Saint Roch, actuellement fermée, nécessite une restauration, un des objectifs de l’association Tenzoriou Ploerin.
Document établi par Muriel Rouzic pour les journées Généalogie et Patrimoine les 1er et 2 avril 2017 au Cyberia de Plourin.